En 2007, les artistes installent frauduleusement des audiobugs à l’intérieur de l’opéra de Zurich. Ils captent le son de l’opéra qui est retransmis à un serveur téléphonique hacké par le collectif. Un programme informatique – l’Opera calling machine – redistribue ces données en contactant aléatoirement par téléphone les habitants de Zurich.
Plus de 4 000 foyers sont contactés les uns à la suite des autres pour une retransmission totale de 90 heures d’opéra. L’interlocuteur se voit ainsi délivrer le concert au creux de l’oreille. Libre de l’écouter ou non, sitôt qu’il raccroche, un nouveau numéro est appelé. L’œuvre Opera Calling est une vidéo présentant sur fond noir un enregistrement sonore sous-titré d’un de ces appels téléphoniques. Cette œuvre réunit par le média deux lieux distincts et deux représentations simultanées, celle de l’opéra et celle de la vie d’une famille discutant de ce qu’elle est en train de vivre et d’entendre.
Avec cette œuvre, les !Mediengruppe Bitnik nous replongent dans l’histoire du média téléphonique comme diffuseur de contenu. En effet le premier usage prévu par Graham Bell de son invention à la fin du XIXe siècle, et ensuite repris par le Théâtrophone de Clément Ader en France, l’Electrophone à Londres et le Telefon HirmondO à Budapest au début du XXe, était d’être une source centrale de transmission et de diffuser de la musique, des informations, des sermons ou des représentations musicales et théâtrales.
La réimplémentation de ce service par le hack artistique des !Mediengruppe Bitnik leur permet d’illustrer l’un des principes fondamentaux du hacking lui-même, celui de la liberté d’information et du partage de contenu à tous, gratuitement. Principe antagoniste au fonctionnement de l’opéra en Suisse qui, même si le pays consacre 80 % de son budget culturel à l’opéra en 2007, continue de proposer des places onéreuses excluant de fait une partie de la population.
En parallèle de l’œuvre les artistes ont publié un « How to », manuel permettant à qui le souhaite de créer une installation similaire.
Créé à Zurich en 2003 par Carmen Weisskopf et Domagoj Smoljo, le collectif !Mediengruppe Bitnik pratique le hack artistique. Ils testent les limites des systèmes technologiques, notamment ceux de transmissions de données en direct. Ils les infiltrent, les occupent pour les manipuler et les détourner afin d’en proposer de nouveaux usages, de nouvelles manières de les percevoir.
En savoir plus
Site du collectif :
wwwwwwwwwwwwwwwwwwwwww.bitnik.org
Podcast – Entretien avec le collectif et présentation de l’exposition « jusqu’ici tout va bien » du 23 octobre 2010 au 23 janvier 2011